QCM, la laïcité & espaces publics

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#1. Un cinéma, un commerce ou un établissement bancaire sont considérés comme des espaces publics

D’après la loi de 2010, « l’espace public est constitué des voies publiques ainsi que des lieux ouverts au public ou affectés à un service public ».

La circulaire d’application de cette loi en apporte une définition encore plus précise : « Constituent des lieux ouverts au public les lieux dont l’accès est libre (plages, jardins publics, promenades publiques…) ainsi que les lieux dont l’accès est possible, même sous condition, dans la mesure où toute personne qui le souhaite peut remplir cette condition (paiement d’une place de cinéma ou de théâtre par exemple). Les commerces (cafés, restaurants, magasins), les établissements bancaires, les gares, les aéroports et les différents modes de transport en commun sont ainsi des espaces publics. Les lieux affectés à un service public désignent les implantations de l’ensemble des institutions, juridictions et administrations publiques ainsi que des organismes chargés d’une mission de service public. Sont notamment concernés les diverses administrations et établissements publics de l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, les mairies, les tribunaux, les préfectures, les hôpitaux, les bureaux de poste, les établissements d’enseignement (écoles, collèges, lycées et universités), les caisses d’allocations familiales, les caisses primaires d’assurance maladie, les services de Pôle emploi, les musées et les bibliothèques. »

#2. Tout fonctionnaire est soumis au devoir de neutralité, qu’il soit ou non en contact direct avec le public

Le droit de manifester sa religion en public ne peut être exercé par les agents des services publics lorsqu’ils sont dans l’exercice de leurs fonctions, en raison du devoir de neutralité auquel ils sont soumis. L’exigence de neutralité est la même, que l’agent soit ou non en contact avec le public.

#3. Une manifestation religieuse (prière, procession…) organisée sur l’espace public peut être interdite au nom de la laïcité

Une procession, comme tout rassemblement sur l’espace public, ne peut pas être interdite (par arrêté municipal ou préfectoral) au nom de la laïcité, mais peut l’être au nom de la préservation de l’ordre public. L’article 27 de la loi du 9 décembre 1905 rend possible les manifestations religieuses sur la voie publique et définit les conditions de leur réalisation afin d’assurer leur bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publics. Ces motifs peuvent être avancés, en étant justifiées de manière objective, pour éventuellement interdire une manifestation. Le maire peut également imposer un itinéraire ou un espace pour ces manifestations religieuses dès lors que se posent des questions de sécurité ou de bon déroulement de la circulation.

#4. Il est interdit d’apposer un signe religieux sur un monument public

Le principe de neutralité de l’État s’applique non seulement aux agents mais aux bâtiments publics. La loi de 1905 dispose en effet qu’« il est interdit, à l’avenir, d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l’exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires, ainsi que des musées ou expositions ».

#5. Tout citoyen a le droit d’être inhumé dans un carré confessionnel correspondant à sa religion.

S’il est en principe interdit d’établir une séparation dans les cimetières communaux à raison de la différence des cultes (loi du 14 novembre 1881), l’État a régulièrement incité les maires, par diverses circulaires, à aménager des espaces regroupant les défunts de même confession. Ces regroupements peuvent être décidés mais pas imposés par le maire. Dans son rapport de 2004, « Un siècle de laïcité », le Conseil d’État insiste aussi sur l’ambivalence qui prévaut sur ce thème : « L’institution de carrés confessionnels dans les cimetières n’est pas possible en droit. Toutefois, en pratique, ils sont admis et même encouragés par les pouvoirs publics afin de répondre aux demandes des familles […] ».

#6. Un maire peut refuser l’inhumation d’un défunt dans un carré confessionnel en se fondant sur des considérations religieuses

Un maire ne peut refuser l’inhumation d’un défunt dans un carré confessionnel en se fondant sur des considérations religieuses. Cas de jurisprudence : des parents souhaitaient faire inhumer leur fils dans le carré israélite du cimetière communal de Grenoble. De façon informelle, la mairie gérait ce carré en concertation avec une association juive de la ville. Or, aux yeux de celle-ci, l’enfant défunt n’était pas juif, puisque seul son père était juif et que sa mère ne l’était pas. Le maire de Grenoble a donc refusé la demande des parents, qui ont fait annuler cette décision par le tribunal administratif. L’arrêt précise que pour refuser la demande des parents, « le maire pouvait tenir compte de toutes considérations d’intérêt général et notamment celles tirées des nécessités d’ordre public, mais qu’il ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs, écarter ladite demande en se fondant exclusivement sur la circonstance que des autorités religieuses déniaient l’appartenance de la personne décidée à la confession israélite. »

#7. L’interdiction de dissimulation du visage dans l’espace public découle du principe de laïcité

La loi du 11 octobre 2010 interdit la dissimulation du visage dans l’espace public. Dans la circulaire d’application, cette interdiction est présentée comme une façon de « réaffirmer solennellement les valeurs de la République et les exigences du vivre ensemble ». En revanche, le principe de laïcité n’est évoqué ni dans la loi, ni dans la circulaire. La loi interdit « le port de cagoules, de voiles intégraux (burqa, niqab…), de masques ou de tout autre accessoire ou vêtement ayant pour effet, pris isolément ou associé avec d’autres, de dissimuler le visage », sous peine d’une amende de 150 euros et/ou d’un stage de citoyenneté. Elle interdit également le fait d’imposer à quelqu’un de dissimuler son visage en raison de son sexe, délit passible d’un an de prison et de 30 000 euros d’amende. Toutefois, l’interdiction ne s’applique pas « si la tenue est prescrite ou autorisée par des dispositions législatives ou réglementaires » (port du casque pour les conducteurs de deux-roues à moteurs) ou si elle « est justifiée par des raisons de santé ou des motifs professionnels, ou si elle s’inscrit dans le cadre de pratiques sportives, de fêtes ou de manifestations artistiques ou traditionnelles. » Enfin, l’interdiction ne s’applique pas aux lieux de culte ouverts au public (conformément à la réserve du Conseil constitutionnel).

#8. Si une personne au visage couvert se présente dans un service public, l’agent doit lui demander de se découvrir ou de quitter les lieux

Le chef de service est responsable de l’application de la loi. Il lui appartient de l’expliquer à ses agents, d’en informer le public (affiche, dépliants…) et d’actualiser le règlement intérieur. « La dissimulation du visage fait obstacle à la délivrance des prestations du service public. » Si une personne au visage couvert se présente dans un service public, l’agent doit lui demander de se découvrir ou de quitter les lieux mais ne peut en aucun cas la forcer à le faire. Face à un refus d’obtempérer, l’agent ou son responsable doit faire appel aux forces de police ou de gendarmerie nationale qui seules peuvent dresser le procès-verbal et vérifier l’identité de la personne. La Cour européenne des droits de l’Homme a validé cette loi et souligné que la préservation des conditions du « vivre ensemble » était un objectif légitime à la restriction à la liberté de porter un signe religieux.

#9. La mixité femmes-hommes constitue un principe constitutionnel

Aucun texte constitutionnel ou législatif ne fixe d’obligation de mixité. L’objectif de mixité se déduit des principes suivants : le principe d’égalité entre les sexes, intégré à la Constitution de 1946 ; le principe de non-discrimination, défini par de nombreuses lois (notamment celle du 16 novembre 2001) ; le principe d’égalité des usagers devant le service public. La loi garantit toutefois le droit à la non-mixité dans certains cas. Ainsi, sont autorisées les « discriminations fondées, en matière d’accès aux biens et services, sur le sexe lorsque cette discrimination est justifiée par la protection des victimes de violences à caractère sexuel, des considérations liées au respect de la vie privée et de la décence, la promotion de l’égalité des sexes ou des intérêts des hommes ou des femmes, la liberté d’association ou l’organisation d’activités sportives. »

#10. Des locaux municipaux peuvent être loués à des associations cultuelles

L’article L. 2144-3 du Code général des collectivités (CGCT) permet aux mairies de mettre des locaux communaux à disposition « d’associations, de syndicats ou de partis politiques qui en font la demande ». Il appartient au maire de « déterminer les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l’administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l’ordre public. » Une association cultuelle (loi 1905) peut bénéficier de la mise à disposition de locaux communaux pour un usage cultuel (exclusif ou non) sous réserve que cette mise à disposition ne soit pas consentie à titre gratuit ou dans des conditions préférentielles ou pour une durée indéterminée. Il s’agit d’éviter qu’elle ne soit assimilée à une aide interdite par l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 (« La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte (1) »). Les mêmes dispositions s’appliquent pour les associations loi 1901, y compris celles ayant une activité cultuelle non exclusive (2). S’il s’agit d’un local appartenant au domaine privé de la collectivité (cas de la totalité des locaux prêtés par la Ville aux associations), son utilisation ou son occupation repose généralement sur un contrat de location de droit privé.

1. Ce principe a été rappelé très récemment par une décision du Conseil d’État (CE, 19 juillet 2011, CNE de Montpellier, n° 313518) et par la circulaire du ministère de l’Intérieur du 29 juillet 2011.

2. CE 9 octobre 1992, CNE Saint-Louis c/Association Shiva Soupramanien de Saint-Louis.

Terminé

Monsieur Mondon

Émulateur de curiosité

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